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 Cours n°1 Zoologie ( EVOLUTION DU RÈGNE ANIMAL)

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sami

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MessageSujet: Cours n°1 Zoologie ( EVOLUTION DU RÈGNE ANIMAL)   Cours n°1 Zoologie ( EVOLUTION DU RÈGNE ANIMAL) I_icon_minitimeMar 20 Juil - 22:33

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Cours n°1 Zoologie ( EVOLUTION DU RÈGNE ANIMAL)

Cours n°1 Zoologie ( EVOLUTION DU RÈGNE ANIMAL) Darwin
Charles Darwin


L'évolution, qu'est-ce que c'est ?

L'idée d'une transformation des êtres vivants au cours du temps a été exprimée à diverses occasions depuis près de 2500 ans, mais ce n'est qu'au 19e siècle que le concept de descendance avec transformation - l'évolution telle qu'on la conçoit aujourd'hui - a été formalisé et doté d'un mécanisme cohérent par Darwin, apportant une vision nouvelle de la vie et de son histoire. La pensée évolutionniste imprègne désormais tous les domaines de la biologie et, par la dimension historique du processus de l'évolution, elle touche également les sciences de la Terre et de l'univers. Comprendre le monde au travers de l'évolution conduit à voir et penser autrement... et c'est sans doute pourquoi cela ne plaît pas toujours !

Les gène homéotiques


Pour illustrer ce fait, prenons l’un des plus beaux exemples de la biologie moderne, celui des gènes homéotiques. Ces gènes particuliers de développement ont tout d’abord été mis en évidence, puis longuement étudiés, chez la drosophile.
Qui s’y intéressait jusqu’au milieu des années 80 ?
Principalement les généticiens et, surtout, les spécialistes de drosophiles. Puis on a découvert que les mêmes gènes (ou plus exactement des gènes homologues) structuraient également le développement antéro-postérieur des vertébrés. L’explication ? Elle est a priori simple : ces gènes ont été hérités d’un ancêtre commun.
Que disent alors les paléontologues ? Que cet ancêtre commun date au bas mot de 540 millions d’années. Subitement, cette dimension temporelle relativise complètement le premier résultat. Ce qui pouvait paraître à certains comme une caractéristique de la drosophile, voire des insectes, acquiert une grande généralité en devenant l’apanage d’une grande partie des animaux (en fait, seulement les bilatériens). La découverte des gènes homéotiques a alors été vulgarisée ; en 1995, Ed Lewis a reçu le Prix Nobel, avec Christiane Nüsslein-Volhard et Eric Wieschaus, un siècle et un an après la définition du concept d’homéose par William Bateson (1861 – 1926). C’est la théorie de l’évolution qui a permis d’appréhender l’importance considérable des gènes homéotiques, et c’est à ce moment qu’on les a popularisés. Pour généraliser cet exemple, toute démarche comparative en biologie ne brille de ses feux qu’à l’intérieur d’un schéma évolutif. En retour, de telles généralisations deviennent les principales preuves de la théorie de l’évolution qui reste le seul cadre conceptuel donnant son unité à l’ensemble de la biologie (paléontologie comprise), quelle que soit la sous-discipline ou le niveau d’organisation.

Reconnaître l’évolution conduit à constater l’existence d’une histoire, sur la Terre, de l’ensemble des organismes vivants. Comprendre l’évolution consiste à déceler les mécanismes qui ont présidé à la structuration actuelle de la biodiversité, en permettant les multiples adaptations des animaux, des végétaux, des organismes unicellulaires, adaptations qui sont parfois d’une telle précision qu’elles semblent défier l’imagination. Il s’agit donc tout à la fois de décrypter la manière dont les organismes se sont modelés dans leurs formes et leurs fonctions, et de rechercher l’origine des nouveautés et des potentialités évolutives. Ainsi les recherches sous-tendues par le concept d’évolution se séparent clairement en deux volets ; les unes visent la reconstruction de l’histoire de la vie, les autres tendent à comprendre les modalités et les processus de l’évolution.


Beaucoup de temps a été nécessaire pour qu’une telle ligne directrice puisse émerger. En effet, au cours de longs tâtonnements, il a fallu de la réflexion, et il a fallu des faits. Petit à petit, les éléments essentiels sont apparus pour donner un cadre conceptuel qui a acquis sa cohérence au milieu du XXème siècle, pour s’enrichir par les résultats les plus récents de la systématique et de la biologie moléculaire.



Classer les organismes



Il est indispensable de retracer les grandes lignes de l’histoire de cette théorie, afin de comprendre l’émergence difficile de ce cadre conceptuel a priori simple, mais d’une grande complexité dans le détail. Tout a commencé par la volonté de classer les organismes. Les premières classifications du monde vivant ont été de type utilitaire, étant donné que c’était d’un catalogue raisonné dont on avait besoin. Ainsi, en botanique, dès Théophraste (vers 372 – 287 av. J.–C.), on distinguait les arbres, les arbustes, les plantes médicinales, les plantes vénéneuses... De telles classifications, réalisées par les Grecs puis les Romains, perdurèrent jusqu’à la Renaissance, jusqu’à ce que l’on reconnaisse qu’elles n’étaient pas satisfaisantes.
Mais comment faire autrement ? Ce fut tout d’abord un constat d’échec - qui amena certains auteurs à donner une classification par ordre alphabétique -, puis de multiples tentatives (les systèmes et les méthodes), les unes basées sur la morphologie des feuilles ou des racines, d’autres sur la structure des fleurs, d’autres encore sur la nature des graines ou des fruits... Les résultats, bien que sensiblement différents suivant les approches, permettaient dans bon nombre de ces tentatives de retrouver les grandes familles de la botanique. Certains naturalistes, comme le Suédois Carl von Linné (1707-1778), affirmèrent que ce ne pouvait être une simple coïncidence ; il devait exister une classification unique, dite Classification Naturelle, peut-être inaccessible dans sa totalité, mais que l’on retrouvait localement de temps à autre. Il y avait donc bel et bien un "Ordre de la Nature" qui, dans la culture judéo-chrétienne de l’époque, correspondait bien sûr à celui de la création divine. C’est de cette époque que date la hiérarchie des taxons, à savoir pour le monde animal : Règne / Embranchement / Classe / Ordre / Famille / Genre / Espèce.

Une échelle des êtres



Parallèlement, une longue tradition remontant à l’Antiquité défendait l’existence d’une " Échelle des Êtres ", c’est-à-dire l’établissement d’une hiérarchie de l’ensemble des éléments figurés d’origine naturelle, dont les organismes vivants, suivant une complexité croissante. On trouvait en bas de l’échelle les quatre éléments, puis les minéraux, suivis des végétaux ; les animaux étaient rangés selon leur plus ou moins grande ressemblance avec l’Homme : vers, poissons, amphibiens et reptiles, oiseaux et mammifères. L’Homme était bien évidemment au plus haut de l’échelle des êtres matériels,... mais, à une certaine époque, plus bas que les anges et archanges. Au XVIIIème siècle, Gottfried Leibniz (1646 - 1718) popularise cette échelle des êtres, qui va être reprise par Charles Bonnet (1720 - 1793) en biologie. Dès lors, deux conceptions vont interférer, celle de l’Échelle des Êtres et celle de la Classification Naturelle.

La subordination des caractères



Les progrès vont être très importants quand, avant la Révolution, Bernard de Jussieu (1799-1876) et son neveu Antoine-Laurent (1748-1836) vont définir la notion-clé de subordination des caractères. Ils se rendent compte que, pour déterminer un taxon donné, une classe par exemple, l’idéal est d’avoir un (ou plusieurs) caractère(s) constant(s) à l’intérieur de cette classe et variable(s) dans toutes les autres. Un type de caractère est donc utile à un niveau précis de la classification, certains au niveau de l’ordre, d’autres au niveau du genre... Les caractères sont donc "subordonnés". On peut alors faire un tri parmi les caractères issus de descriptions détaillées, et faire surgir ceux qui sont pertinents d’un point de vue taxinomique, en les hiérarchisant. On pensait avoir trouvé la "Méthode Naturelle" menant à la Classification Naturelle. Si les Jussieu l’appliquent en otanique, dès la fin du XVIIIème siècle, Jean-Baptiste Lamarck (1744-1829) et Georges Cuvier (1769-1832) l’appliquent au monde animal, le premier essentiellement chez les mollusques et les animaux vermiformes, le second chez les vertébrés et pour l’ensemble des animaux.

La notion de transformisme



C’est à ce moment qu’émerge, de façon structurée, la notion de transformisme, c’est-à-dire l’idée que les organismes vivants peuvent se "transformer", suivant le temps. Mais, pour que ce concept puisse être développé de façon pertinente, il faudra démontrer l’inanité de certaines croyances. Citons en deux. L’adhésion à l’existence de la génération spontanée empêchait évidemment la structuration d’un quelconque concept évolutif, car on pouvait alors imaginer des apparitions d’animaux de la même espèce à différents moments de l’histoire, par différents événements de génération spontanée. Dès 1765, Lazzaro Spallanzani (1729 – 1799) conteste ce dogme. Mais il faudra en fait attendre la controverse Pasteur–Pouchet pour qu’il soit définitivement enterré. On peut tenir le même raisonnement avec l’idée de métamorphose. En effet, au XVIIème siècle existait encore l’idée de la transformation d’un organisme adulte en un autre organisme adulte. Par exemple, les anatifes (crustacés cirripèdes) pouvaient se transformer en canards ; ou encore, en Afrique, existaient des arbres dont les feuilles se transformaient en poissons quand tombant dans l’eau d’une rivière ou en chauve-souris quand entraînées par le vent. Tout cela, évidemment, dut être réfuté pas à pas. Enfin, il y a le problème du temps ; Georges Buffon (1707 – 1788) bat en brèche les 6000 ans proposés par certains théologiens comme âge de la Terre, âge calculé à partir du recensement des générations décrites dans la Bible. Il propose plusieurs centaines de milliers d’années puis, dans une lettre, plusieurs millions. L’intérêt de cette proposition réside dans la démarche. Buffon se base sur une expérience. Il considère que la Terre a été à un moment une boule de roche en fusion. Il calcule le temps qu’un boulet de canon met pour se refroidir, et applique une règle de trois, connaissant la masse de la Terre. Même si le raisonnement et le calcul étaient simplistes, on abandonne des temps brefs qui n’autorisaient pas d’évolution.

Le concept d'homologie



L’application au monde animal des idées des Jussieu eut des résultats extrêmement positifs ; ainsi, on constata qu’au niveau des embranchements, le caractère pertinent était le plan d’organisation. Les quatre embranchements définis par Cuvier - les vertébrés (Vertebrata), les articulés (Articulata), les mollusques (Mollusca) et les radiaires (Radiata) - se trouvent caractérisés par des plans si différents qu’ils en paraissent irréconciliables, confirmant Cuvier dans son fixisme. Étienne Geoffroy Saint-Hilaire (1772-1844) va être amené à définir l’homologie - bien qu’à l’époque ce n’était pas ce terme qui fut utilisé -, notion essentielle qui permet de comparer des organismes ayant même plan d’organisation. Sont homologues deux organes qui ont même situation dans un plan d’organisation, ce qui sera interprété plus tard comme témoignant d’une même origine embryologique. Ce concept va briser la notion de similitude globale. En effet, deux organes peuvent être homologues et n’avoir ni même taille, ni même forme, ni même fonction. Les pattes antérieures des mammifères en sont un bon exemple : la patte du cheval, l’aile de la chauve-souris, l’aileron de la baleine sont homologues. Un tel critère va être employé avec succès en zoologie, puis va revenir en botanique, principalement par le botaniste suisse Augustin-Pyrame de Candolle (1778-1841).

La "mort des espèces"



Parallèlement, Cuvier, par ses travaux de paléontologie, montrait que les espèces pouvaient disparaître, introduisant le concept crucial de " mort des espèces ". On ne pourra alors sauver le fixisme que par le biais de créations multiples. Etienne Geoffroy Saint-Hilaire, entreprenant des travaux d’embryologie, constatait avec Étienne Serres (1786-1868) qu’au cours de leur développement, les embryons des organismes " supérieurs " passaient transitoirement par des formes identiques à celles revêtues de manière permanente par des organismes " inférieurs ". Parallèlement, Karl von Baer (1792-1876) clamait que la comparaison devait se faire entre embryons différents et non entre l’embryon d’un animal et le stade adulte d’un autre. Il montrait qu’au cours de l’embryogenèse les caractères généraux, par exemple ceux caractéristiques de l’embranchement ou de la classe, apparaissent avant les caractères particuliers des taxons de bas rang, comme le genre ou l’espèce.


Pendant ce temps, Lamarck avait proposé la première hypothèse transformiste raisonnée, ceci dans sa leçon introductive de son cours au Muséum en 1901, puis publiée en 1809 dans sa Philosophie zoologique. Il admettait que les espèces se modifiaient progressivement au cours du temps, à partir d’un état primitif très simple apparaissant par génération spontanée. Les organismes étaient alors engagés dans un processus d’accroissement de la complexité. Son interprétation n’eut pas beaucoup de succès.

Le concept de descendance avec modification



En introduisant le concept de descendance avec modification, Charles Darwin (1809-1882) va donner une toute autre vision de la Classification Naturelle. Pour lui, les caractères utiles en taxinomie - les caractères homologues -, sont ceux qui sont hérités d’un ancêtre commun ; ainsi, il affirme que toute classification doit être généalogique, et que la communauté de descendance est le lien caché que les naturalistes ont longuement cherché. Classer les animaux et faire de la phylogénie deviennent alors une seule et même chose ; Il ne peut y avoir qu’une seule classification naturelle, puisqu’il n’y a eu qu’une seule histoire de la vie sur Terre. La structuration de la biodiversité actuelle n’est que le résultat d’une longue histoire. Définir les liens de parenté entre espèces peut permettre de mieux comprendre les mécanismes qui sous-tendent cette évolution.

Les relations entre embryologie et systématique s’éclairent alors différemment. Les intuitions de Geoffroy Saint-Hilaire et de Serres d’une part, de von Baer d’autre part s’interprètent dans un cadre historique. C’est ce qu'Ernst Haeckel (1834-1919) a proposé par sa "loi biogénétique fondamentale" :"La série des formes par lesquelles passe l’organisme individuel à partir de la cellule primordiale jusqu’à son plein développement n’est qu’une répétition en miniature de la longue série des transformations subies par les ancêtres du même organisme, depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours".


La sélection naturelle


Revenons à l’idée de descendance avec modification. En fait, Darwin l’eut lorsqu’il osa la comparaison entre certaines des observations qu’il fit dans la nature - en particulier pendant son voyage sur le Beagle (1831-1836) -, et les résultats obtenus par les sélectionneurs anglais - principalement de chevaux, de chiens et de pigeons. Il se rendit compte que ceux-ci, utilisant la variabilité des organismes au sein de l’espèce, choisissaient certains caractères héréditaires remarquables, en réalisaient par des croisements judicieux des combinaisons particulières, puis sélectionnaient les animaux porteurs de ces combinaisons en éliminant les autres. De cette manière, à l’intérieur d’une même espèce, des races étaient créées. La diversité des chiens est là pour en témoigner. Darwin fit l’analogie entre les différences entre races entretenues par le sélectionneur à l’intérieur d’une espèce et les différences qui existent dans la nature entre espèces proches. Il conclut que celles-ci ne pouvaient exister dans la nature que s’il y avait l’équivalent d’une sélection en œuvre. Pour lui, cette sélection est le résultat des conditions du milieu qui, dans leur ensemble, agissent à chaque instant en introduisant une inégalité entre les organismes qui, suivant leurs caractéristiques, seront plus ou moins favorisés. La résultante de toutes ces conditions environnementales - climat, prédateurs, parasites.. - a été appelée "sélection naturelle", pour insister sur l’analogie entre le rôle du sélectionneur et le rôle de la nature. Mais l’analogie s’arrête très vite : si le sélectionneur agit suivant un plan défini en vue d’un but précis, la sélection naturelle ne joue que dans l’instant.

L’idée-clé de Darwin a un corollaire : la variation des caractères est indépendante de la sélection et donc la précède, étant donné qu’on ne peut sélectionner que des caractères qui existent déjà. Le rôle du sélectionneur est de réaliser des combinaisons de caractères qui, naturellement, ont une faible probabilité d’apparaître, puis d’augmenter leurs occurrences en éliminant les autres organismes : ce qui était globalement rare devient alors localement fréquent. De même, la sélection naturelle va favoriser les organismes portant telle combinaison de caractères, et par là-même deux populations d’une même espèce soumises à deux environnements différents subiront des sélections naturelles différentes. Ils pourront donc présenter, après de nombreuses générations, des différences notables résultat d’un tri réalisé à partir des caractères existant déjà dans l’espèce. La sélection naturelle n’a donc pas créé de nouveauté ; elle n’a fait que trier parmi l’existant.

Une telle vision soulève certaines questions fondamentales. Elles sont en fait de deux ordres. On peut tout d’abord se demander comment ces caractères héréditaires passent de génération en génération, et comment en apparaissent des variations. D’autre part, on peut se demander comment ces caractères héréditaires, qui sont transmis de génération en génération de manière invisible uniquement par les cellules sexuelles, se mettent en place lors de la construction de l’organisme, au cours de son développement. Ce seront les buts respectivement de la génétique et de l’embryologie.


L'essor de la génétique des populations



On comprend maintenant pourquoi Darwin n’a pas reçu les travaux de Gregor Mendel (1822-1884) comme on aurait pu le penser : Mendel avait trouvé en 1866 les lois de transmission des gènes, mais pas leur variation. Mendel amenait en fait des arguments aux fixistes, car il expliquait la manière dont les caractères sont immuablement transmis de génération en génération. En 1900, lors de la "redécouverte des lois de Mendel", suivant l’expression consacrée, Erich von Tschermak (1871-1962), Carl Correns (1864-1933) et Hugo de Vries (1848-1935) - surtout ce dernier - expliquèrent d’une part les règles de transmission des caractères héréditaires, d’autre part leur variation, c’est-à-dire la mutation. La génétique naissante pouvait alors se marier aux idées darwiniennes. Il suffisait d’affecter aux caractères héréditaires des coefficients de sélection. Qui plus est, on pouvait mathématiser cette démarche. Ce fut l’essor de la génétique des populations, initiée indépendamment en 1908 par Godfrey Hardy (1877-1947) et Wilhem Weinberg (1862-1937) et reprise entre les années 1920 et 1930 par la célèbre triade Ronald A. Fisher (1890-1962), John B. S. Haldane (1892-1964) et Sewall Wright (1889-1988).

L’ensemble de ces données permirent plus ou moins de régler une controverse qui faisait rage depuis la fin du siècle précédent. Les protagonistes, Karl Pearson (1857-1936) et William Bateson (1861-1926) n’étaient pas d’accord sur la nature de la variation. Le premier, élève du biométricien Francis Galton (1822-1911) et aidé du biologiste Walter Weldon (1860-1906), soutenait la notion très darwinienne du gradualisme, c’est-à-dire d’une variation continue au cours du temps. Le deuxième versait vers le saltationnisme, c’est-à-dire que la variation se faisait de manière discontinue, par saut. Il est clair que le mutationnisme de de Vries donnait des arguments à Bateson, tandis que la génétique quantitative plaidait pour le gradualisme. Cette controverse, qui fut à certains moments extrêmement violente, s’estompa avec le temps. La vision gradualiste gagna du terrain, pour plus ou moins s’imposer après la deuxième guerre mondiale avec la théorie synthétique de l’évolution.


Etudier le support des caractères héréditaires


L’étude du support des caractères héréditaires était alors patiemment entreprise. Ce furent : la théorie chromosomique postulée par E. Sutton en 1902, confirmée par l’équipe de Thomas Morgan (1866-1945) entre 1910 et 1920 ; la mutagenèse provoquée, réalisée par Hermann Müller (1890-1967) en 1926 ; le rôle fondamental de l’ADN par Avery, McLeod et McCarthy en 1944, confirmée par Hershey et Chase en 1951 ; enfin, la fameuse double hélice de l'ADN par James D. Watson et Francis Crick en 1953. Parallèlement, la fonction du gène était décortiquée. Haldane postulait en 1932 qu’il devait jouer un rôle dans le métabolisme. Avec Beadle et Tatum, la relation un gène-une enzyme était établie en 1941. Luria et Delbrück démontraient en 1943 l’indépendance entre mutation et sélection. Enfin, ce fut en 1960 la découverte de l’ARN messager par François Jacob et Jacques Monod (1910-1976).


Pendant ce temps, l’embryologie se développait et amenait des résultats importants. Outre les travaux de Haeckel, August Weissmann (1834-1914) rejetait l'hérédité des caractères acquis en montrant que la lignée germinale - celle qui produit les cellules sexuelles - était indépendante de la lignée somatique, celle qui produit l’organisme sensu stricto. D’autre part, Hans Spemann (1869-1941) démontrait le mécanisme-clé de l’embryologie, l’induction. À cette époque, de grands généticiens comme William Bateson (1861-1926), Morgan, puis plus tard Conrad Waddington (1905-1975), étaient aussi des embryologistes. Pourtant, paradoxalement, on voit se développer une opposition importante entre embryologistes et généticiens. Les premiers reprochent à leurs collègues de ne s’intéresser qu’à des futilités - comme la couleur des yeux -, et de ne pas tenir compte du rôle du cytoplasme en embryologie. Les derniers reprochent aux embryologistes de ne s’intéresser qu’à des caractères complexes, dont on ne connaît pas le soubassement génétique. L’animosité atteindra son paroxysme quand les généticiens se tournèrent vers les bactéries et les virus, organismes dépourvus d’embryologie...


La théorie synthétique de l'évolution


Les retrouvailles - correspondant au rêve des Bateson et Morgan - se feront par la génétique du développement à partir de 1980. Mais ne nous y trompons pas : il fallait pour cela les techniques de biologie moléculaire et de la phylogénie moderne pour pouvoir interpréter les données. Pour cela, le détour par les bactéries paraissait - a posteriori il est vrai - inévitable.

Entre 1950 et 1960, par coïncidence, se retrouvèrent à Harvard trois biologistes célèbres : le généticien Theodosius Dobzhansky (1900-1975), le systématicien Ernst Mayr et le paléontologiste George G. Simpson (1902-1984). La confrontation de leurs idées amena une convergence importante vis-à-vis des théories de l’évolution, et donna ce que l’on appela la "théorie synthétique de l’évolution". On se retrouve peut-être dans une autre période-clé au cours de laquelle une nouvelle vision unitaire de l’évolution peut être tentée. En effet, il faut maintenant intégrer de nombreuses données récentes. La génétique nous renseigne sur les sources de nouveauté au niveau du génome. La biologie du développement renseigne sur l’établissement des plans d’organisation. Les techniques de reconstruction phylogénétique amènent une description plus fine de l’histoire du vivant, en particulier sur les variations des rythmes évolutifs, scandés par des décimations et des explosions diversificatrices. Tout ceci nous permet de mieux comprendre cette biodiversité dont la structuration n’est pas que spatiale, mais spatio-temporelle.

La notion d’histoire du règne animal est relativement récente dans la pensée scientifique. Après la Renaissance, les premiers naturalistes cherchaient seulement à mettre de l’ordre dans nos connaissances en comparant les caractères des divers animaux: c’est à ce souci que répondent en particulier les classifications de Ray,et de Karl Von Linné.

L’existence des fossiles

c’est-à-dire de restes conservés d’organismes disparus ou de traces de leur activité – avait été reconnue dès l’Antiquité (Hérodote, Empédocle), puis à la Renaissance par Bernard Palissy et Léonard de Vinci. Nicolas Stenon montra dès 1667 que les glossopètres, considérées comme des pierres en forme de langue de serpents ou d’oiseaux, étaient en réalité des dents pétrifiées de requins. Buffon non seulement admettait la conservation des organismes à l’état fossile, mais soulignait l’existence de genres disparus tel le Mastodonte (connu alors par des dents mamelonnées provenant des États-Unis). Mais la notion de formes disparues n’implique pas obligatoirement celle d’«évolution»: il était possible aussi d’admettre logiquement qu’il y avait eu plusieurs créations successives séparées par des «révolutions» du globe qui avaient provoqué l’extinction des espèces ; c’est l’hypothèse que proposa Cuvier dans son Histoire des ossements fossiles (1812) et dans son célèbre Discours sur les révolutions du globe (préface du précédent ouvrage). À la suite d’études minutieuses d’anatomie comparée des Vertébrés actuels et fossiles, il démontra l’existence de genres et d’espèces disparus. Mais il rejeta l’hypothèse transformiste, apparemment pour deux raisons principales: la première est que, si divers systèmes évolutionnistes avaient été proposés au XVIIe siècle, ceux-ci étaient le plus souvent purement fantaisistes. Cuvier, voulant faire œuvre de savant, ne pouvait évidemment souscrire aux propos d’un philosophe tel que Maillet qui, dans son Telliamed (1749), admettait que des Poissons échoués sur terre avaient pu donner naissance à des Oiseaux. La seconde est que Cuvier n’avait aucune idée de la très longue durée des temps géologiques; encore prisonnier à ce sujet du texte de la Genèse, il croyait que les temps géologiques fossilifères couvraient quelques millénaires, tandis que nous savons aujourd’hui qu’ils représentent environ 600 millions d’années. Observant qu’une momie égyptienne d’Ibis ne présentait avec l’Ibis actuel aucune différence notable, il déduisit que les espèces ne se transforment pas. Dès lors, puisqu’il constatait l’existence de formes disparues, l’hypothèse qui lui semblait la seule valable était celle des créations successives. Cependant, comme au XIXe siècle les découvertes géologiques se succédaient toujours plus nombreuses, il fallait ou bien renoncer aux révolutions du globe, ou les multiplier. C’est ce que firent Quenstedt ainsi que d’Orbigny qui admettait vingt-sept créations successives.

Dès l’Antiquité (Anaximandre) et la Renaissance (Cardan, Vanini), un courant d’idées tout différent affirmait l’évolution des espèces, quel que fût le mécanisme invoqué. Mais, jusqu’à Lamarck compris, il s’agissait plutôt de conceptions philosophiques, de systèmes, d’intuitions que de travaux véritablement scientifiques. Avec Darwin et l’Origine des espèces (1859), la méthode change et des preuves de l’évolution sont mises en lumière; mais elles sont tirées la plupart du temps de la biologie des animaux actuels et ce ne sont pas des arguments paléontologiques que Darwin invoque dans ses œuvres, malgré les grands progrès faits en ce domaine au début du XIXe siècle avec les travaux d’Agassiz, Owen, von Meyer... Deux disciples de Darwin montrèrent que la paléontologie des Vertébrés apportait les preuves indiscutables du transformisme: T. Huxley, en Angleterre, mit en lumière l’importance de l’Archaeopteryx , découvert en 1861, comme forme intermédiaire entre les Reptiles et les Oiseaux, tandis que Gaudry cherchait à regrouper les connaissances de son époque dans un livre célèbre, Les Enchaînements du monde animal.

L’étude des fossiles à la lumière de l’évolution a d’autre part changé radicalement notre conception de la classification des animaux; celle-ci reste une clef permettant de les déterminer, mais elle doit aussi refléter l’histoire du règne animal et celle de ses lignées, c’est-à-dire la phylogénie. Si les savants ne sont pas tous d’accord à propos des mécanismes de l’évolution, il n’existe plus aujourd’hui de paléontologiste fixiste, car une telle interprétation impliquerait une création continue impossible à concevoir. La biostratigraphie démontre avec la plus grande netteté que les groupes zoologiques des Vertébrés n’apparaissent pas au hasard dans les couches géologiques successives, mais suivant un ordre précis et selon une complexité croissante; elle a prouvé l’existence de formes intermédiaires entre les groupes; elle a retracé la succession des genres ou des espèces dans le temps selon des lignées évolutives.
L’histoire du règne animal est ainsi la reconstitution, grâce à des méthodes d’analyse aujourd’hui renouvelées par la méthode cladistique (voir cet article), des relations de filiation et de parenté (phylogenèse) entre les lignées évolutives.

1. Évolution des Invertébrés

Les premiers fossiles

L’évolution des Invertébrés est relativement mal connue, car l’origine des principaux embranchements nous échappe. Les terrains sédimentaires les plus anciens ont en effet été transformés (métamorphisme) dans les profondeurs de la Terre en terrains cristallophylliens dans lesquels les fossiles ont été détruits. Mais ceux-ci ont pu laisser quelques traces: ainsi, certaines roches contenant du graphite sont, de plus, riches en éléments chimiques tels que le vanadium, le zinc, le bore, le molybdène, etc., tandis que d’autres roches graphitiques en sont dépourvues. Il est probable que la présence de ces éléments est la conséquence de l’existence d’organismes vivants, aujourd’hui disparus, dans lesquels ils s’étaient concentrés.
Les astronomes admettent que la Terre s’est formée il y a 4 milliards 600 millions d’années et les géochimistes considèrent que la vie a dû apparaître durant une longue phase pendant laquelle l’atmosphère était encore dépourvue d’oxygène. Celui-ci proviendrait de l’activité d’organismes photosynthétiques dont les premières traces dateraient de 3,76 milliards d’années (hypothèse Schidlowski, 1988).


Pour le règne animal, le progrès des connaissances a conduit à découvrir des fossiles de plus en plus anciens. Barrande, en 1846, étudiant des terrains cambriens (début du Primaire) de la Bohême, croyait être en présence de la première faune apparue sur notre globe, de la faune «primordiale»; elle est précédée en réalité par une faune du Cambrien inférieur aujourd’hui bien connue. Les terrains antérieurs au Cambrien, âgés de plus de 600 millions d’années, appartiennent au Précambrien ; ils sont, la plupart du temps, métamorphiques. Cependant, quelques restes d’organismes y ont été découverts. Glaessner a, en 1982, décrit la riche faune du gisement australien d’Ediacara (Précambrien tardif). Elle comprend (fig. 1) six genres de Méduses différentes, des Cœlentérés pennatulides, à colonies en forme de plumes, des Vers annelés (Dickinsonia , Spriggina ), peut-être un Échinoderme, mais à symétrie spéciale (Tribrachidium ), et des organismes énigmatiques à structure tout à fait constante mais que nous ne savons rattacher à aucun groupe actuel. Le Précambrien est fossilifère en plusieurs autres localités: Pennatulides fossiles d’Afrique du Sud (Rangea ) et d’Angleterre (Charnia ), Méduse en Arizona, Brachiopode primitif (Lingulella ), à coquille plus courte que celle de la lingule actuelle, dans le Montana, micro-organismes et spicules d’éponges.


Au total, on ne connaît pas au Précambrien – de façon certaine tout au moins – de représentants fossiles des Mollusques, des Arthropodes et des Échinodermes; cela ne signifie naturellement pas que de tels organismes n’aient pu alors exister, car les fossiles précambriens sont évidemment fort rares et le témoignage des fossiles reste très incomplet.

Formes intermédiaires

Puisque plusieurs grands embranchements d’Invertébrés se sont individualisés, probablement dès le Précambrien, et que rien ne prouve que les formes souches d’où ils proviennent aient été fossilisables, nous ne connaissons que quelques très rares fossiles ayant des caractères intermédiaires entre divers embranchements; nous citerons cependant deux exemples. Le premier concerne les Monoplacophores, connus à l’état fossile au Cambrien supérieur et au Silurien. Leur forme rappelle celle d’une Patelle – aussi les avait-on d’abord classés dans les Gastéropodes – mais des impressions musculaires paires s’observent à l’intérieur de la coquille (ex. Tryblidium ). Leur anatomie restait inconnue jusqu’à la découverte d’un représentant actuel dans l’océan Pacifique, au large du Mexique, à 3 750 mètres de profondeur. Celui-ci, appelé Neopilina (fig. 2), possède une organisation segmentaire; chaque segment comprend une paire de muscles et une paire de néphridies. Cet animal peut donc être considéré, à certains égards, comme ayant à la fois des caractères de Mollusques et des caractères de Vers annélides. Le second exemple est donné par le genre Aysheaia (Cambrien moyen de la Colombie-Britannique) qui est peut-être proche de l’origine commune des Annélides et des Arthropodes. Cet animal rappelle les Péripates actuels: son corps annelé, à onze paires de pattes, portait des papilles

Phylogénie

Il est, comme on vient de le voir, bien difficile de se représenter les enchaînements des divers embranchements d’Invertébrés; des synthèses ont été proposées non par les paléontologistes, mais par les anatomistes et les embryologistes. Ils ont établi que les Échinodermes sont des Deutérostomes, alors que les autres Invertébrés sont des Protostomes. Chez ceux-ci, la bouche de la larve correspond à celle de l’embryon, tandis que, chez les premiers, la bouche définitive est une néoformation. Les Échinodermes (comme les Ptérobranches d’ailleurs) se rapprochent par suite des Vertébrés. La plupart des schémas évolutifs séparent donc les Échinodermes des autres Invertébrés. À titre d’exemple, nous rappellerons la théorie de Haeckel et celle de Metchnikov. Selon Haeckel, la phylogenèse reproduirait en quelque sorte le développement de l’œuf d’Oursin; après le stade œuf correspondant aux Protozoaires, le stade blastula, sans intestin différencié, correspondrait aux Spongiaires, et le stade gastrula aux Cœlentérés. À partir de ceux-ci se différencieraient les deux lignées protostome et deutérostome. Pour Metchnikov, au contraire, la larve planula des Cœlentérés (blastula à deux feuillets formés par délamination) serait comparable à un stade primitif de l’évolution des premiers Invertébrés. Ces théories, purement hypothétiques, ne sont pas étayées par la paléontologie.

Principaux embranchements

Cœlentérés

Les premiers récifs coralliens apparaissent à l’Ordovicien (Silurien inférieur). Ils sont formés par des Cœlentérés (Anthozoaires) qui disparaîtront ultérieurement: Tétracoralliaires (les septes calcaires s’organisent dans les calices par cycles de 4 ou multiples de 4); Tabulés (le fond des loges du squelette est découpé par des cloisons transversales); Stromatopores (squelettes avec couches calcaires concentriques réunies par des piliers verticaux). Les premiers Hexacoralliaires (septes par cycles de 6 ou multiples de 6) apparaissent au Trias; ils ne sont pas encore constructeurs de récifs, mais le deviendront à partir du Jurassique; depuis le Crétacé, les Hexacoralliaires connus sont très voisins des formes actuelles.

Mollusques

– Gastéropodes .

Les Gastéropodes apparaissent au Cambrien inférieur. Les Diotocardes sont connus depuis le Cambrien supérieur; ils atteignent leur apogée au Primaire pour régresser ensuite, bien qu’ils soient encore abondants actuellement. Les Monotocardes apparaissent au Silurien. Les Pulmonés ne se développent abondamment qu’à partir du Jurassique supérieur.
– Lamellibranches . La charnière des premiers Lamellibranches est taxodonte (dents petites, toutes semblables, régulières); les dents peuvent alors converger vers le crochet (Actinodontes) ou rayonner à partir du centre de la valve (Cténodontes). Les différents types de la charnière apparaissent à partir de ces deux types primitifs, l’évolution du groupe étant particulièrement rapide au Trias. On appelle Rudistes des Lamellibranches fixés par une valve le plus souvent épaissie et en cornet; ces formes ne sont connues qu’au Jurassique et au Crétacé.

– Céphalopodes .

On les subdivise en Nautiloïdea (Tétrabranchiaux), Coleoïdea (Dibranchiaux) et Ammonoïdea .

– Groupe des Nautiloïdea .

Les premiers Nautiles sont des formes droites (Orthocères), puis, dès l’Ordovicien, les coquilles s’enroulent et, bien que les Orthocères persistent jusqu’à la fin du Primaire, les formes enroulées deviennent prédominantes.

– Groupe des Coleoïdea .

Les Bélemnites semblent dériver des Orthocères, car elles ont comme eux des loges très espacées.

– Groupe des Ammonoïdea .

L’évolution bien connue des Ammonites est caractérisée essentiellement par la complication de la ligne de suture des loges, projection de la limite des deux loges consécutives de la coquille sur un plan tangent à la surface externe de celle-ci. Les premières Ammonites connues sont enroulées mais, au cours de l’évolution, on assiste parfois, au Trias et au Crétacé, à des déroulements de la coquille.


La distinction Antennates-Chélicérates reflétant l’opposition entre Crustacés et Insectes (à antennes) et Araignées et Scorpions (à chélicères) est considérée par certains auteurs comme fondamentale. Dans ce cas, les Arthropodes seraient un groupe non homogène ayant une origine double (diphylétisme). Cependant, l’hiatus entre Antennates et Chélicérates est, dans une certaine mesure, comblé par l’existence de formes fossiles (Proarthropodes ou Trilobitomorphes) à caractères intermédiaires, ce qui apporte un argument en faveur d’une origine simple (monophylétisme).
Parmi les Crustacés, les Décapodes apparaissent au Trias et, dès ce moment, la distinction entre Natantia (type crevette) et Reptantia (type crabe) est nette. Quant aux Insectes, le plus ancien est un Collembole, Rhyniella du Dévonien moyen. La faune des Insectes du Carbonifère comprend des Blattes, des Homoptères et des groupes aujourd’hui éteints, tels que les Paléodictyoptères. Au Permien apparaissent les Insectes à métamorphose complète (Holométaboles), tels que les Coléoptères. Au Jurassique, presque tous les ordres actuels existent, sauf les Lépidoptères, connus seulement de façon sûre depuis l’Éocène. Le Crétacé, avec le développement des plantes à fleurs, a sûrement marqué une étape importante du développement des Insectes.

Comme Arthropodes complètement disparus, on doit citer les Trilobites et les Euryptérides exclusivement primaires et définitivement éteints.

Échinodermes

Les formes plates (Carpoïdes) débutent au Cambrien avec des genres à symétrie bilatérale (Cothurnocystis ). Les Crinoïdes actuels (comatule) sont libres le plus souvent, à part des formes abyssales; les Crinoïdes fossiles étaient au contraire en général fixés par un pédoncule. Les formes primitives sont très différentes des formes ultérieures qui sont le plus souvent des Articulata , à bras munis d’articulations nombreuses et très mobiles. Les Échinides débutent avec des formes à symétrie radiaire, les Paléchinides, qui disparaissent au Permien. Au Secondaire prennent naissance des Oursins irréguliers chez lesquels réapparaît une symétrie bilatérale par migration de l’anus dans un plan antéropostérieur, corrélative parfois également d’une migration de la bouche.

Graptolites

Les Graptolites, Invertébrés coloniaux dont les individus étaient dans les logettes insérées sur un réseau (Dendroïdes) ou sur des axes (Graptoloïdes), sont longtemps restés énigmatiques. Kozlowski a montré que leur squelette est formé de petits arceaux chitineux, les fusellus, que l’on retrouve chez les Ptérobranches actuels, Invertébrés coloniaux proches des Vertébrés à divers égards. Les Graptolites apparaissent donc comme un grand groupe qui s’est épanoui avant les Vertébrés (Cambrien et Silurien), mais qui est proche de leur origine.

Diversification spatiotemporelle

L’étude des faunes précambrienne et cambrienne a permis d’observer, outre des Invertébrés se rattachant à des groupes actuels, diverses formes dont les plans d’organisation diffèrent assez de ceux connus par la suite pour justifier la création de nouveaux embranchements: c’est le cas de plusieurs fossiles du Cambrien de Colombie-Britannique (Hallucigenia , Opabinia , Wiwaxia , etc.). Bien que tous les embranchements d’Invertébrés actuels existent déjà au Cambrien, la diversité anatomique (et donc systématique) du stock faunistique dont ils font partie pourrait être un trait fondamental de l’évolution biologique, à savoir l’apparition, dès les commencements d’un groupe, d’une importante gamme de schémas d’organisation, réduite ensuite, par des extinctions massives et aléatoires, à un petit nombre de modèles, ce qui tend à limiter le jeu ultérieur de l’évolution.

Cette notion semble s’opposer à celle, plus traditionnelle, d’une diversification croissante et continue du vivant. Mais l’antinomie ne serait qu’apparente pour autant que cette deuxième conception reflète le mode d’évolution de lignées qui, épargnées par les grandes extinctions aléatoires, représenteraient les quelques modèles anatomiques de base à partir desquels ont pu ensuite se différencier un grand nombre de variantes. C’est ce que montrent les documents paléontologiques: quelques moments de forte diversification affectant les groupes zoologiques et qui, en modifiant quelque peu le schéma de base, leur permettaient de s’adapter (radiation adaptative) à des conditions de vie variées. Après quoi auraient pu survenir des périodes de régression ayant entraîné la disparition totale de certains groupes, comme on le constate dans plusieurs phylums (plusieurs phylums actuels tels les Brachiopodes, les Céphalopodes et les Crinoïdes).

2. Origine des Vertébrés aquatiques

Le Vertébré le plus ancien (Sacabambaspis ) provient de l’Ordovicien inférieur de Bolivie. Arandaspis a été trouvé dans l’Ordovicien supérieur d’Australie. On connaît d’autres genres de même âge aux États-Unis, avec les fragments de cuirasse et d’écailles (Astraspis ) ou d’écailles seules (Eriptychius , Pycnaspis ) des grès de Harding (Colorado). Ces restes appartiennent à des Vertébrés dépourvus de mâchoires différenciées.

Craniates et Vertébrés

Il y a peu encore, les systématiciens divisaient l’ensemble des Vertébrés en deux groupes radicalement opposés: d’une part, les Agnathes, représentés dans la nature actuelle par les Myxines et les Lamproies, et, d’autre part, les Gnathostomes, avec les Poissons vrais, les Amphibiens, les Reptiles, les Oiseaux et les Mammifères.

Les Agnathes sont caractérisés par l’absence de mâchoires, une oreille interne à un ou deux canaux semi-circulaires et des arcs branchiaux en position externe par rapport aux branchies qu’ils soutiennent, alors que les Gnathostomes possèdent des mâchoires, trois canaux semi-circulaires et des arcs branchiaux internes par rapport aux branchies (fig. 4).
Principalement sur la base de ces différences qui semblaient, il est vrai, ne laisser que peu d’espoir de trouver des formes de structure intermédiaire, on en a conclu à une dichotomie fondamentale des Vertébrés.
Les Vertébrés siluro-dévoniens, regroupés tout d’abord sous le terme général de Poissons cuirassés du fait que leur corps était enfermé dans une cuirasse osseuse plus ou moins continue, ont par la suite été répartis entre Agnathes (avec les Ostéostracés, les Hétérostracés, etc.) et Gnathostomes (avec les Placodermes) en fonction de leur anatomie. Mais l’application de la méthode cladistique à l’étude de tous ces groupes, actuels comme fossiles, a permis de modifier radicalement la conception classique non seulement de la systématique mais aussi de l’histoire évolutive des Vertébrés

En premier lieu, la recherche des synapomorphies a permis, d’abord, de confirmer la monophylie des Gnathostomes, puis de faire éclater le groupe des Agnathes, désormais considéré comme paraphylétique (certains Agnathes sont plus proches parents des Gnathostomes que d’autres Agnathes), et enfin de proposer des cladogrammes reflétant la plus ou moins grande proximité relative, dans le temps, des ancêtres communs des différents groupes, et donc d’esquisser une classification fondée sur la phylogénie

Le premier groupe traditionnellement considéré comme appartenant aux Vertébrés, et dont l’ancêtre s’est différencié de celui de tous les autres Vertébrés, est celui des Myxines. L’absence de vertèbres ou de toute structure homologue semble être ici une condition originelle: pour cette raison, les Myxines ne sont plus classées parmi les Vertébrés, mais constituent un taxon autonome. Elles forment avec les Vertébrés stricto sensu (c’est-à-dire les autres Agnathes et les Gnathostomes), qui représentent leur groupe frère, le groupe des Craniates, caractérisé par plusieurs synapomorphies, comme la présence d’un crâne, la possession de crêtes neurales, etc.

Ostracodermes

Les «Poissons cuirassés» de grade agnathe étaient, il y a peu encore, regroupés sous le terme d’Ostracodermes et divisés en Ptéraspidormorphes (Hétérostracés) et en Céphalaspidomorphes (Ostéostracés et Anaspides). La monophylie de ces derniers a été révoquée en doute, et il est aujourd’hui préférable de classer séparément les Ostéostracés et les Anaspides.
Les Ostéostracés (ex. Cephalaspis , Kiaeraspis , etc.) sont aujourd’hui parmi les Vertébrés dont l’anatomie crânienne est mieux connue, grâce à une heureuse circonstance. Le crâne de ces animaux est si ossifié que les trajets des nerfs crâniens et des vaisseaux sanguins sont parfaitement moulés par l’os: sur les fossiles, on peut donc observer les canaux des nerfs et des vaisseaux remplis de gangue et entourés par le tissu osseux souvent bien conservé. On peut alors dégager ces canaux à l’aiguille sous la loupe binoculaire en faisant une véritable dissection dans la roche; on peut aussi sectionner le fossile suivant des plans transversaux parallèles très rapprochés (distants d’environ 20 mm), dessiner ces sections agrandies et, à partir de celles-ci, construire des modèles des crânes des Ostéostracés disparus. Grâce à cette «méthode des sections sériées», Stensiö (1927) a pu reconstituer les nerfs et les vaisseaux crâniens de ces Ostéostracés avec une étonnante précision, bien que ces organismes aient vécu il y a environ 400 millions d’années. Leur tête et l’avant du tronc étaient enfermés dans un squelette rigide, le bouclier céphalique; les yeux, proches l’un de l’autre, s’ouvraient sur la face dorsale du bouclier; entre les yeux s’observent, en outre, un orifice épiphysaire et, plus en avant, un orifice nasohypophysaire. Mais les Ostéostracés présentent une autre particularité remarquable: l’existence à l’avant de la tête d’arcs viscéraux en nombre plus grand que ceux des autres Vertébrés. Chez les Poissons (Gnathostomes), le premier arc – arc mandibulaire – comprend le palatocarré au-dessus de la bouche et la mandibule en dessous; l’arc suivant est l’arc hyoïdien; puis, plus en arrière, s’observent les différents arcs branchiaux I, II, III, IV, V, etc. Entre les arcs successifs s’ouvrent des fentes. La première de ces fentes, entre l’arc mandibulaire et l’arc hyoïdien, le plus souvent fermée, peut persister, sous forme d’un orifice, le spiracle ou évent, présent chez les Sélaciens. Chez les Ostéostracés, il y a, en outre, plus en avant, une fente préspiraculaire et un arc branchial prémandibulaire. Les Ostéostracés sont les seuls Vertébrés connus à avoir possédé cette disposition incontestablement primitive. Par ailleurs, ces animaux sont déjà très évolués, leur forme témoigne d’une adaptation à la vie benthique. Les Ostéostracés sont d’ailleurs très variés; le bouclier céphalique peut s’étendre sur le corps et l’englober plus ou moins complètement (Dartmuthia , Tremataspis ), être ajouré (Sclerodus , etc.); la position de la bouche allongée antéropostérieurement ou transversalement ainsi que l’orientation des arcs branchiaux, conservés sous forme de crête visible le long de la face inférieure du bouclier, plus ou moins oblique par rapport à l’axe de symétrie de la tête, permettent de distinguer des groupes bien définis.


Les Anaspides (ex. Rhyncholepis du Silurien de Norvège) sont beaucoup moins ossifiés: le corps et la tête étaient recouverts d’écailles assez minces disposées en marqueterie sur la tête et en rangées verticales sur le corps. Cette dernière disposition est intéressante car elle semble bien prouver que la musculature du corps sous-jacente aux écailles était encore primitive, les muscles formant des massifs successifs dans le sens antéropostérieur, un massif sous chaque écaille. C’est précisément la même disposition musculaire que l’on observe chez l’Amphioxus actuel. Chez les Anaspides, l’hypophyse occupait, comme chez les Ostéostracés et la Lamproie, une position dorsale sur la tête. La nageoire caudale était hypocerque, avec son plus grand lobe dirigé vers le bas (c’est l’inverse chez les Sélaciens).
Les Hétérostracés ont, au contraire des Ostéostracés, une cuirasse céphalique formée de plaques séparées (ex. Pteraspis du Dévonien inférieur des Ardennes, d’Angleterre, etc.; Cyathaspis du Silurien supérieur; Drepanaspis du Dévonien moyen; etc.); ils comprennent les plus anciens Vertébrés jusqu’ici découverts puisque Astraspis est un Ptéraspidomorphe. Leur anatomie interne est beaucoup moins connue que celle des Ostéostracés, parce que chez les Hétérostracés le squelette ne moulait ni l’encéphale ni les nerfs et vaisseaux crâniens. La présence de deux canaux semi-circulaires verticaux (un de plus que chez les Myxines) et l’absence de nageoires paires ou impaires (caudale exceptée) permettent de penser qu’ils partagent un ancêtre commun avec l’ensemble des Vertébrés (Myxines exclues).


Un autre groupe assimilable aux anciens Ostracodermes est celui des Galéaspides . Localisés dans le Silurien et le Dévonien de la Chine et du nord du Vietnam, ils possédaient un bouclier céphalique comparable à celui des Ostéostracés, mais qui était ouvert ventralement d’une large fenêtre; celle-ci devait être obturée in vivo par des tissus mous portant une plaque osseuse centrale et à la périphérie desquels étaient situés les orifices de la bouche et des branchies.
La vision traditionnelle de la phylogénie et de la classification de ces premiers Vertébrés a été complètement révolutionnée par la recherche de caractères dérivés communs. À l’heure actuelle, on considère volontiers les Céphalaspidomorphes comme un groupe artificiel et, si les Anaspides pourraient représenter le groupe frère des Lamproies, les Ostéostracés partagent plus de synapomorphies avec les Gnathostomes (nageoires paires en position postbranchiale, caudale épicerque, conduit lymphatique ouvert vers l’extérieur, etc.). La position des Galéaspides n’est pas très claire car ils n’ont ni nageoires paires ni nageoires impaires (sauf la caudale), mais le fait qu’ils possèdent de l’os périchondral et un exosquelette d’os cellulaire les rapproche de l’ensemble Ostéostracés-Gnasthostomes, dont ils représenteraient le groupe frère. L’ensemble Anaspides-Lamproies partage avec celui formé par les Galéaspides, les Ostéostracés et les Gnasthostomes, entre autres synapomorphies, la présence d’arcs neuraux. L’ancêtre commun de tous ces groupes aurait déjà pu posséder des nageoires paires qui auraient disparu dans la lignée menant aux Anaspides-Lamproies et dans celle menant aux Galéaspides.

Enfin, la possession de deux canaux semi-circulaires dans l’oreille interne et d’un système de la ligne latérale permet de considérer les Hétérostracés comme le groupe frère des précédents, l’ensemble constituant les Vertébrés (stricto sensu).

En conclusion, le paléontologue est amené à considérer l’histoire phylétique des Craniates non plus comme un processus affecté d’une dichotomie primordiale scindant le groupe en Agnathes et Gnathostomes, mais plutôt comme une séquence d’émergence successive des grands groupes d’Agnathes au sein d’une lignée chez un des membres déjà dérivé (car proche de l’ancêtre des Ostéostracés) de laquelle seraient apparues les synapomorphies fondant le taxon des Gnasthostomes.

Gnathostomes ichtyens

Placodermes

Les premiers Gnasthostomes apparaissent bien après les premiers Agnathes au Silurien supérieur: ce sont les Placodermes. Ils se caractérisent par l’existence d’une double cuirasse thoracique: la cuirasse céphalique antérieure s’articule sur un (Phylactaenioïdes) ou deux condyles de la cuirasse thoracique postérieure. Ces Placodermes présentent des adaptations très variées; la cuirasse thoracique peut être longue et pourvue d’une forte épine pectorale sur laquelle s’insérait la nageoire (Dolichothoraci ; formes du Dévonien inférieur) ou au contraire courte (Brachythoraci ; formes connues surtout dans le Dévonien moyen et supérieur). Certaines formes sont nageuses (Coccosteus , Dunkleosteus ); d’autres, aplaties, vivaient sur les fonds marins et pouvaient d’ailleurs être géantes. Dans certains groupes de Placodermes, la cuirasse de la tête est dissociée en petites plaques (Radotinides, Rhénanides). L’anatomie de ces animaux est très bien connue et a pu être étudiée dans les moindres détails: la boîte crânienne, les nerfs et les vaisseaux crâniens, l’oreille interne ont pu être reconstitués dans de nombreux genres différents, selon les mêmes techniques que celles appliquées aux Ostéostracés. Cette anatomie montre clairement que les Placodermes sont proches parents des Élasmobranches actuels, avec lesquels on les range d’ailleurs dans l’ensemble des Élasmobranchiomorphes. Les Placodermes ptyctodontides présentent plus spécialement des convergences avec un groupe spécial d’Élasmobranches, les Holocéphales, représentés par la chimère actuelle: ainsi chez Ctenurella , Ptyctodontide du Dévonien rhénan, retrouve-t-on des crochets copulateurs et un appendice rostral. L’anatomie des Rhénanides rappelle au contraire, à divers égards, celle des raies, sans qu’ils soient d’ailleurs dans l’ascendance de celles-ci, qui n’apparaissent qu’au Jurassique.
Les Antiarchés représentent un sous-groupe très particulier d’Arthrodires chez lesquels les yeux sont situés au milieu du bouclier céphalique. Leur nageoire pectorale est transformée en un étui creux de plaques qui devait jouer un rôle dans l’équilibration de l’animal. Cette structure n’est absolument pas homologue au bras des Vertébrés tétrapodes; en effet, les os d’un bras sont situés à l’intérieur de celui-ci et représentent donc un endosquelette, tandis que, dans l’aiguillon pectoral des Antiarchés, le squelette est externe (exosquelette). Ces animaux n’ont rien à voir non plus avec les Arthropodes tels que la Limule, comme on l’a cru autrefois, puisque, chez les Arthropodes, l’exosquelette est chitineux, tandis qu’il est osseux chez tous les Placodermes. On a supposé aussi que ces animaux possédaient déjà des poumons; en général, cette hypothèse n’a pas été admise. Quoi qu’il en soit, la structure de cette pectorale des Antiarchés est très particulière (aucun rayon). Les Arthrodires – Antiarchés compris – disparaissent au Dévonien supérieur.

Acanthodiens

Les Acanthodiens, connus du Silurien supérieur au Permien inférieur, ont été longtemps classés dans les Placodermes. À part quelques ressemblances avec les Élasmobranches, lesquelles se retrouvent chez les Arthrodires, ils n’ont guère de caractères communs avec ceux-ci. Aussi est-il plus prudent de les considérer comme un groupe à part, rappelant à certains égards les Élasmobranches (présence d’un spiracle bien développé, caudale hétérocerque), à d’autres les Actinoptérygiens (leurs petites écailles rhombiques se retrouvent chez le premier Actinoptérygien connu, Cheirolepis ). On avait supposé que ces animaux possédaient une fente spiraculaire entièrement ouverte et que, par suite, l’arc hyoïdien ne jouait chez les Acanthodiens aucun rôle dans la suspension de la mandibule (aphétohyoïdie). Selon cette hypothèse, proposée aussi pour les Arthrodires, les Placodermes auraient représenté un stade primitif de l’organisation des Vertébrés, stade dans lequel la bouche serait encore courte, tandis que, chez la plupart des Poissons, la fente spiraculaire se serait plus ou moins complètement fermée, en raison de l’agrandissement, vers l’arrière, de la cavité buccale. Cependant les études anatomiques récentes n’ont pas confirmé ces points de vue et il n’y a pas lieu d’admettre l’existence d’un tel stade aphétohyoïdien.

Actinoptérygiens

Les Actinoptérygiens sont des Poissons osseux à nageoire rayonnante; ils comprennent le grand groupe actuel des Téléostéens, lequel se développe surtout à partir du Tertiaire, les Chondrostéens avec l’Esturgeon et le Polyodon à écailles épaisses ganoïdes et à squelette cartilagineux, et les Holostéens également à écailles ganoïdes, mais à squelette osseux. La paléontologie démontre que le groupe des Holostéens est paraphylétique alors que Chondostnéens et Téléostéens seraient monophylétique. Les Esturgeons sont anatomiquement très proches des premiers Actinoptérygiens connus, les Paléoniscides carbonifères, mais, chez les Esturgeons, le squelette est cartilagineux au lieu d’être osseux. L’évolution des Actinoptérygiens se caractérise surtout par le raccourcissement de la joue et le redressement du dispositif de suspension de la mandibule, par la diminution du nombre des rayons des nageoires, par la transformation de la caudale qui, asymétrique et à lobe supérieur plus développé dans les formes anciennes (caudale hétérocerque), devient symétrique et homocerque dans les formes récentes.

Sarcoptérygiens

Les Vertébrés qui possèdent des poumons ont également des narines internes, ou choanes, faisant communiquer les fosses nasales et la bouche. La présence de choanes chez un Vertébré fossile nous permettra donc de supposer que son possesseur devait pouvoir respirer autrement que par les branchies, même si celles-ci persistaient encore. Comme tous les Vertébrés terrestres ont des choanes, l’existence de choanes chez certains Poissons démontre que ceux-ci sont au voisinage de l’origine des Vertébrés tétrapodes. Säve-Söderbergh a proposé le nom de Choanata pour désigner tous les Vertébrés à choanes. Les Poissons osseux, dont les nageoires paires sont articulées aux ceintures par un seul élément basal, comprennent, outre les Cœlacanthes et les Dipneustes actuels, plusieurs groupes fossiles (Porolépiformes, Ostéolépiformes et Pandérichtyides). Avec les Tétrapodes, qui sont les Vertébrés terrestres, ils forment l’ensemble des Sarcoptérygiens .

Les Dipneustes ne sont représentés dans la nature actuelle que par trois genres: Neoceratodus d’Australie, Protopterus d’Afrique tropicale et centrale, Lepidosiren d’Amazonie, mais le genre Ceratodus eut au Trias une répartition mondiale. Les Dipneustes apparaissent donc, dans la nature actuelle, comme un groupe relictuel dont les derniers représentants sont de surcroît géographiquement séparés, certainement par régression de leurs aires de répartition. Les Dipneustes primaires se distinguent facilement des actuels par leur ossification beaucoup plus marquée, par la présence d’un grand nombre de petites plaques dans le toit crânien, par leurs écailles plus épaisses; mais l’anatomie de ce groupe est restée remarquablement constante au cours des temps géologiques, à part le fait que la chondrification remplace chez les Dipneustes actuels l’ossification. Les Dipneustes peuvent, en plus de leur respiration branchiale, respirer dans l’atmosphère grâce à des poumons. On avait donc supposé que les Dipneustes possédaient des choanes et qu’ils étaient à l’origine des Batraciens urodèles (ex. Salamandre, Triton). Mais il semble bien prouvé aujourd’hui que les Dipneustes n’ont pas de narines internes (Jarvik): les orifices que l’on observe effectivement sur le bord du plafond buccal des Dipneustes, chez Neoceratodus , ne se forment pas du tout comme les choanes véritables des Tétrapodes et ont d’ailleurs des rapports différents avec les nerfs voisins. Ce sont donc des pseudo-choanes et il en résulte que les Dipneustes ne peuvent être à l’origine des Urodèles, ce que confirme une étude détaillée de l’anatomie des deux groupes. Par exemple, le palais des Dipneustes montre des os dont la disposition est tout à fait différente de celle des Urodèles, et les vertèbres massives des Dipneustes ne ressemblent aucunement aux vertèbres en étui des Urodèles.
Les Cœlacanthes apparaissent au Dévonien et sont connus à l’état fossile jusqu’au Crétacé; un Cœlacanthe actuel, le genre Latimeria , dont une vingtaine d’exemplaires ont été pêchés au large des Comores, est aujourd’hui bien connu grâce aux belles descriptions de Millot et d’Anthony. Ces descriptions ont confirmé, dans l’ensemble, l’exactitude des reconstitutions des paléontologistes, d’autant plus que les Cœlacanthes représentent un groupe étonnamment conservateur: Latimeria se distingue essentiellement des Cœlacanthes fossiles par la régression de l’os et le développement du cartilage.
Tous ces groupes de Poissons fossiles ont-ils une origine commune? Certainement oui, puisque ce sont tous des Gnathostomes et qu’ils présentent, par suite, des caractères communs, en particulier en ce qui concerne l’appareil branchial et la disposition des nageoires; mais il faut bien constater que nous ne connaissons pas au Dévonien de formes intermédiaires entre ces grands groupes de Poissons qui restent toujours, même quand on remonte dans le temps, profondément différents les uns des autres. Le Polyptère actuel, qui est incontestablement proche des Actinoptérygiens, a cependant certains caractères des Sarcoptérigiens, mais, chez les Poissons fossiles, nous ne connaissons pas pour l’instant de formes qui pourraient être à l’origine, par exemple, à la fois des Sarcoptérygiens et des Actinoptérygiens, ou à la fois des Arthrodires et des Acanthodiens. L’ancêtre préichthyen, qui a dû logiquement exister et à partir duquel ont dû se différencier les grands groupes de Poissons, reste inconnu, et comme, dès l’abord, ces groupes apparaissent en général assez distincts les uns des autres, il est probable que cet ancêtre préichthyen devait vivre bien avant les premiers Poissons fossiles connus, peut-être même au Cambrien.

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